RSO

FC Plessis-Robinson, passeur de mémoire

mardi 9 mai 2023 - 11:16 - Richard LOYANT
FC Plessis-Robinson

Depuis six ans, le FC Plessis-Robinson (Hauts-de-Seine) organise des voyages reliant football, culture et diversité afin d’ouvrir ses jeunes joueurs au monde, à son passé et à ses richesses.

De Verdun à l’Arménie, en passant par l’Italie et la Pologne, une vingtaine de U11-U12, aujourd’hui devenus U15-16, du FC Plessis-Robinson ont découvert d’autres sociétés et touché à la grande Histoire inscrite à leurs programmes scolaires, en marge de tournois qu’ils ont disputés. Lauréat des trophées Philippe-Séguin 2022 du Fondaction du Football pour cette initiative, le club des Hauts-de-Seine est reparti cette saison dans un nouveau cycle avec une nouvelle génération de joueurs, comme l’explique son directeur technique Julien Zenguinian.

 RETOUR À VERDUN 

Les 27 et 28 mai prochains, une équipe U13 du FC Plessis-Robinson se rendra dans la Meuse pour participer au 28e Trophée de la Paix, tournoi international réunissant des formations U8-U9 à U16 organisé par le FC Verdun Bellevile GV. Une habitude pour le club de la région parisienne depuis 2017, là où tout a commencé en parallèle du sportif. Cette année-là, les jeunes ont prolongé leur séjour en allant au fort de Douaumont et à la tranchée des baïonnettes, hauts-lieux de mémoire de la Grande Guerre. Deux ans plus tard, l’ossuaire de Douaumont et les villages détruits par les bombardements de 1916 étaient au programme. « On devait aller en Pologne mais avec le Covid, cela a été annulé, justifie Julien Zenguinian. On est donc reparti chez nos amis de Verdun car on ne pouvait pas sortir du territoire mais on ne voulait pas non plus arrêter nos visites. »

Qui sont désormais indissociables du parcours sportif. « L’un de nos éducateurs suivait la scolarité des enfants et on s’y est intéressé de plus près. On a démarré avec ce tournoi de Verdun, qui coïncidait avec leurs cours sur la Première Guerre mondiale. Il y a eu beaucoup de choses positives chez les enfants, dans la découverte des sites historiques, des tranchées… Cela nous a donné l’idée de poursuivre nos déplacements sportifs annuels en essayant de se calquer sur leur programme. On est parti avec des enfants de 11 à 12 ans et on a fini à leurs 16 ans en suivant, année après année, leur cursus scolaire. Cette ligne de conduite nous a amené en différents lieux où se sont déroulés des événements mondiaux importants à connaître dans le devoir de transmission. »

Visite guidée à la mairie de Verdun et ses souvenirs de la Grande Guerre au lendemain du tournoi (photo FC Verdun Belleville GV).

 DE BOLOGNE À EREVAN 

En 2018, direction l’Italie pour le tournoi international de Castel Maggiore, assorti des visites du musée Ferrari, de la plus ancienne université d’Europe et du centre médiéval de Bologne. « En rapport aussi avec leur programme sur l’Italie fasciste, de la Première Guerre mondiale à la transition vers la Seconde », explicite Julien Zenguinian. Avant la Pologne en 2021 pour le tournoi international de Wroclaw, couplé à Cracovie, aux camps d’Auschwitz-Birkenau, à l’usine Oskar Schindler et à la mine de sel de Wieliczka. « Des moments incroyables à vivre avec les enfants, là où le devoir de mémoire prend tout son sens. »

D’autres « instants inoubliables » ont suivi l’an dernier, « en rapport avec l’Affiche rouge, Missak Manouchian et la Résistance. On a réalisé tout un travail en amont en allant au cimetière d’Ivry où se trouve la stèle sur laquelle figurent les noms de vingt-trois résistants fusillés. En Arménie, outre un tournoi de quatre jours avec quatre équipes locales, on s’est rendu au Mémorial du génocide à Erevan, à Adiyaman où est né Missak Manouchian, on a effectué une randonnée vers le monastère d’Aghavnavank avant de nous reposer au bord du lac de Sevan dans un parc aquatique et on a passé des moments rares avec les enfants de l'orphelinat de Gavar ». Durant ce séjour de dix jours, la vingtaine de joueurs a également travaillé sur l’écologie et la citoyenneté et participé à des travaux de rénovation de classes et de chambres, « ce voyage ayant aussi pour objectif de les ouvrir à la dimension humanitaire ».

En Arménie la saison dernière (photo FCPR).

 LES MOTS DE GINETTE KOLINKA 

Un important travail de préparation en amont s’avère indispensable pour que ces voyages soient pleinement réussis. Avant la Pologne, le club a ainsi organisé la venue d’historiens en marge des entraînements. « J’ai approché le Mémorial de la Shoah puis le grand-rabbin de France Haïm Korsia, raconte Julien Zenguinian. Nous sommes aussi entrés en contact avec Ginette Kolinka, une survivante du camp de concentration d’Auschwitz-Birkenau. Cette femme admirable de 98 ans aujourd’hui, d’une force et d’une gentillesse impressionnantes, a accepté de rencontrer les enfants. » Une première fois en 2021 puis une deuxième le 18 février 2022, tant la première expérience les avait marqués.

« On l’a renouvelée car c’est un honneur de recevoir cette grande dame. C’est incroyable de l’entendre raconter ce qu’il s’est passé entre son arrestation en mars 1944 et sa libération par les Alliés en mai 1945, les convois, le camp des femmes, le travail dans les usines… On mesure l’importance de ses paroles, l’émotion et l’intensité de son témoignage sur l’horreur de ce qu’elle a pu vivre au quotidien. Cela a largement dépassé le cadre du club puisque ce deuxième échange était ouvert à tous. On a réuni près de trois cents personnes à l’école Anatole-France, parents, enfants et tous les professeurs des collèges de la ville présents. D’une idée de départ pour nous assez simple, on est parvenu à quelque chose de global à travers des expériences de déportés, des voyages exceptionnels à faire et à vivre pour un club de foot. »

Ginette Kolinka entourée de toutes les générations du FC Plessis-Robinson (photo FCPR).

 PROFS, PARENTS, JOUEURS, JEU EN TRIANGLE 

Pour en arriver là, le club a choisi de s’appuyer sur l’Éducation nationale. « Dès qu’on lui a parlé du projet, la communauté scolaire a été ouverte et à l’écoute, se réjouit le directeur technique du FCPR. On s’est mis en relation avec les deux collèges de la commune, dont les professeurs nous ont aiguillés sur les grandes lignes du programme et ce sur quoi ils travaillaient, pour pouvoir avoir une trame d’années en années et essayer de parler de choses que, eux, allaient étudier durant l’année en cours. » 

Sans laisser les parents sur la touche. « On a eu très peu de réticences de leur part et au contraire, des retours très positifs. Sept ou huit sont venus accompagner les enfants en Pologne et en Arménie. Quand ils voient leurs gamins épanouis, heureux et contents de ces séjours, c’est pour eux une forme de bien-être de savoir qu’ils sont dans un club qui essaie de proposer des choses qui plaisent. Depuis que l’on a mis en œuvre tous ces projets, on a cette sensation d’être bien au club, tant avec les enfants qu’avec leurs parents, et c’est vraiment plaisant à vivre. »

 PRÉPARATION ET RETOUR D’EXPÉRIENCE 

« Le sportif reste la base, on part pour un tournoi et à travers lui, il y a la découverte d’un événement majeur que l’on prépare sur l’année, résume le directeur technique du FCPR. Le sportif, c’est très simple, on a l’habitude des matches et d’y préparer les joueurs. L’extra-sportif est plus compliqué avec énormément de choses à mettre en place. Cette génération a par exemple été sensibilisée pendant un an avec leurs professeurs, à visionner des films comme La Liste de Schindler, est allée au mémorial du Mont-Valérien… Le but était qu’ils prennent conscience de ce qu’ils allaient voir et faire. Ils n’avaient sans doute pas mesuré cet aspect dans un premier temps mais quand on arrive devant les grilles d’Auschwitz et que l’on voit ce que Ginette Kolinka a connu... » 

Mais tout ne s’arrête pas au retour. « On essaye de faire vivre le voyage à travers un résumé photos, des rencontres le soir entre eux, qu’il ne soit pas terminé le jour où l’on rentre. Cette saison, on a sollicité ceux qui sont partis à Verdun pour qu’ils viennent parler de ce voyage aux plus jeunes qui vont y aller. Cette transmission d’expérience entre ces générations leur permet aussi de mieux se connaître car sinon, les plus petits ne côtoient pas les plus grands. C’est intergénérationnel et c’est vraiment bien pour la vie du club. C’était notre but, ce melting-pot de toute cette jeunesse et de toutes ces cultures à travers des événements mondiaux dont il faut absolument parler pour que jamais ils ne se reproduisent. » 

Au camp d’Auschwitz-Birkenau (photo FCPR).

 LES LEÇONS DE L’HISTOIRE 

Cette dimension extra-sportive affirmée est entièrement assumée par Julien Zenguinian. « C’est aussi le rôle d’un club de foot. Aujourd’hui, il ne suffit plus d’avoir un terrain et d’y poser un ballon dessus. Il s’agit aussi de transmettre à travers l’éducation des fondamentaux qui nous paraissent importants. Des enfants nous sont confiés dès l’âge de 6 ans et jusqu’à 18 ans, voir plus quand ils continuent chez les adultes : autant que l’on soit capables de leur proposer autre chose que le simple entraînement basique. L’expression qui veut que le football soit une école de la vie n’est pas galvaudée. » 

Alors, quels conseils donnerait-il aux clubs désireux de l’imiter ? « Il faut du temps, des éducateurs investis, un public réceptif, une mairie à l’appui de nos projets et ici, tout s’est trouvé parfaitement réuni. Il faut aussi de la volonté et ne pas s’éparpiller car ce sont des projets longs et difficiles à monter, avec énormément de responsabilités. Quand vous êtes en Arménie à 5 000 kilomètres, on espère que tout va bien se passer mais on n’est jamais à l’abri. Tout doit se passer en totale confiance, dans le cadre d’un projet club auquel tout le monde puisse adhérer. C’est la clé de la réussite. » 

Les bonnes pratiques du football amateur

Avec cette série des « Belles réussites du football amateur », la FFF met à l’honneur les initiatives et actions engagées par ses clubs partout en France. De quartier ou ruraux, avec plus ou moins de licenciés et licenciées mais toujours la même passion des pratiquants et pratiquantes, éducateurs et éducatrices, dirigeants et dirigeantes, de tous âges et toutes générations.

Première étape : Les Enfants de la Goute-d’Or (Ligue de Paris Île-de-France)
Deuxième étape : RC Lemasson Montpellier (Ligue d’Occitanie)
Troisième étape : GF Gesté-Tillières (Ligue des Pays de la Loire)
Quatrième étape : AS Bidache FC (Ligue Nouvelle-Aquitaine)
Cinquième étape : FC de Beausoleil (Ligue Méditerranée)
Sixième étape : Val d’Europe FC (Ligue de Paris Île-de-France)
Septième étape : AS Pagny-sur-Moselle (Ligue du Grand Est)
Huitième étape : FC Saint-Étienne-du-Rouvray (Ligue de Normandie)
Neuvième étape : Lyon-La Duchère (Ligue Auvergne Rhône-Alpes)
Dixième étape : TO Jura Foot (Ligue Bourgogne Franche-Comté)
Onzième étape : Lamballe FC (Ligue de Bretagne)
Douzième étape : FC Plessis-Robinson (Ligue de Paris Île-de-France)

fédération française de football - FFF
Crédit Agricole logo EDF logo Nike logo Orange logo Uber Eats logo Volkswagen logo