« Le cœur va battre très fort »

Tous trois d'origine marocaine, Abdessamad Mohammed, Sid Belhaj et Youness Ahssen vivent une semaine particulière : ils seront spectateurs de la demi-finale de Coupe du monde France-Maroc mercredi avant d'être acteurs d'un autre France-Maroc, samedi en amical.

Le Maroc : le lien familial

Abdessamad Mohammed : « Le Maroc, c’est le pays de mes parents, de ma famille et de mon épouse. C’est le pays de mes enfants. Ce sont mes origines. Mes parents sont de Casablanca, mon épouse de Marrakech. Mes parents sont venus dans les années 70 pour contribuer au développement du pays. Ils ont travaillé dur. Moi je retourne au Maroc souvent, depuis l’enfance avec les vacances, le départ en voiture, tout ce que ça génère comme bons souvenirs. À la fin du rassemblement avec la sélection, je pars quelques jours là-bas. C’est un pays qui m’est très cher. C’est mon deuxième pays. C’est une richesse. »

Sid Belhaj : « Je suis marocain comme je suis français. Je suis bi-national. Je suis né France et j’ai la nationalité marocaine également puisque mes parents viennent du Maroc, d’un petit village à côté d’Oujda dans l’extrême nord, à la frontière algérienne. C’est une région agricole. Ils sont venus dans les années 70. Je suis fier de vivre ici, d’avoir cette double nationalité et cette double culture. Les vacances, je les ai toujours passées au Maroc. Quand je suis là-bas, je me sens chez moi comme je me sens chez moi ici. »

Youness Ahssen : « Moi aussi mes deux parents sont nés au Maroc, mon papa à Rabat, ma maman à Marrakech. Ils sont venus assez jeunes en France, à Roubaix, vers l’âge de 14 ans. J’ai grandi avec la culture marocaine et j’ai grandi et apprécié la culture française. » 

Abdessamad Mohammed (photo Pauline CARRÉ/APL/FFF)

La Coupe du Monde : un match, deux cœurs

Adbessamad Mohammed : « Ce Maroc-France en demi-finale, c’est juste incroyable, parce que les deux pays ont un attachement particulier, parce qu’aussi c’est un choix cornélien pour moi. Ce sont deux pays que j’aime. Je représente la France en tant que joueur. Je supporte la France et je supporte aussi le Maroc. C’est un bon dilemme. Ce ne sont pas des choses qui s’opposent, c’est un match de foot, ce n’est pas la guerre. C’est difficile d’imaginer dans quel état je vais être à la fin du match, parce que je ne sais pas. Mais dans tous les cas, je serais content car j’aurai une équipe en finale à supporter. La France cherche sa troisième étoile et on veut tous cette troisième étoile. De l’autre côté, il y a le Maroc et cette première historique. Les enjeux dépassent le simple petit pays qu’est le Maroc, c’est aussi l’espoir de tout un continent et les valeurs qui sont véhiculées : la solidarité, la fraternité, le respect envers les parents. Ce sont des valeurs qui nous sont très chères. Les Marocains sont un peuple très hospitalier, très accueillant. L’attachement à la France est fort. Ce sont deux parties de moi qui vont s’affronter, donc forcément le cœur va battre très fort. »

Je ne sais pas comment je vais vivre ce match. Une partie de moi sera contente, une partie de moi sera triste, mais j'aurai l'occasion de faire la fête car l'une des deux équipes sera en finale.

Sid Belhaj

Sid Belhaj : « Je n’aurais jamais cru vivre ça un jour parce que je n'aurais pas imaginé le Maroc capable d’aller aussi loin dans cette Coupe du monde, surtout quand on se rappelle qu’en 2018 le Maroc a été le premier éliminé dans la compétition. Ce parcours fait vraiment plaisir. Du côté de l’Équipe de France, c’est toujours chaud de confirmer après un titre mondial, il y avait cette fameuse série de vainqueurs éliminés en poules l’édition d’après. Donc jamais je n’aurais envisagé un tel scénario. Je suis très très content. J’ai vu davantage les matches de l’Équipe de France, je travaille à côté du Futsal et les matches du Maroc étaient souvent l’après-midi. J’ai vu la fin du match contre le Portugal et l’Espagne discrètement au boulot (sourire). Le Maroc a une équipe qui défend très bien et qui arrive à marquer les buts qu’il faut. La France est pour moi, de loin, la meilleure équipe du Mondial depuis le début. Il n’y a pas d’équipe aussi forte et aussi puissante. C’est ma favorite depuis le début. C’est l’ultra favorite maintenant. Je ne sais pas comment je vais vivre ce match. On sera ensemble avec l’équipe au Monténégro. Une partie de moi sera contente, une partie de moi sera triste, mais dans tous les cas, j’aurai l’occasion de faire la fête parce qu’une des deux équipes sera en finale. »

Youness Ahssen : « C’est vraiment spécial ! (rires). La France en demi-finales, c'est logique, je m’attendais à ça. Ils ont gagné en 2018, ils ont gagné la Ligue des Nations. Le Maroc, c’est un exploit. C’est pour ça qu’il y a peut-être plus d’engouement chez les supporters du Maroc et chez les supporters franco-marocains parce que c’est du jamais vu. Je suis un supporter de l’Équipe de France de longue date. Encore plus fier depuis que je porte le survêtement en sélection. D’habitude, on supporte la France d’un côté, le Maroc de l’autre. Ma mère elle est fan de Mbappé, elle regarde Mbappé, mon père c’est Giroud, ça va être chaud à la maison (rires). On verra le jour J. C’est une fierté ! C’est un match qu’on attend depuis longtemps. J’étais au Stade de France lors du dernier France-Maroc. C’était un 2-2. Cela remonte (2007). Ça va être un très, très beau match. Un match du cœur pour nous. Quand on voit Mbappé-Hakimi qui sont proches, quand je lis ou j’écoute Didier Deschamps et les joueurs, il y a du respect réciproque. On est en Coupe du monde, on est en demi-finale, ca va être une fête énorme. »  

Sid Belhaj (photo Pauline CARRÉ/APL/FFF)

France-Maroc : le futsal aussi

Abdessamad Mohammed : « Hasard du calendrier, on va jouer nous aussi le Maroc, samedi à Igalo au Monténégro. Ce match-là, on sera acteurs donc c’est plus facile. On va tout faire pour le gagner. C’est toujours particulier de jouer contre le pays de ses origines. La première et seule confrontation entre les deux nations, je n’étais pas encore appelé. C’est une période très forte en émotions parce que malgré tout, on ne parvient pas à descendre de notre nuage. »

Sid Belhaj : « Le hasard fait bien les choses. Ce sera un moment spécial aussi car c'est la première fois que je vais jouer contre le Maroc. Il y aura beaucoup d’émotion. On va profiter. On va essayer de faire un bon match. Nous, ça reste un match amical et on sera sur le terrain. Il y aura de l’enjeu mais ce sera différent. Le Maroc est une nation qui a montré de très belles choses. Au dernier mondial, ils sont sortis en quarts de finale contre le Brésil, battus 1-0 dans un match vraiment équilibré. Ils rivalisent avec les meilleurs mondiaux, ils ont battu l’Argentine, fait encore match nul contre le Brésil. C’est une équipe qui commence à faire partie du gratin mondial, ce qui n’est pas encore notre cas. Nous, on progresse. Ça sera un match intéressant et en tous cas un rassemblement chargé en émotions. »

Youness Ahssen : « Là on parle Futsal. Je suis fier de porter le maillot de l’Équipe de France. On sera acteurs. La demi-finale, c’est un événement mondial. Nous à notre échelle, on représente aussi la France. Et même si c’est le Maroc en face, on doit gagner. Ils sont 8es au classement mondial mais je sais qu’on va répondre présent, même s’ils ont des qualités physiques, qu’ils sont très, très mobiles. Notre équipe progresse, on n’a plus peur. »

Youness Ahssen (photo Pauline CARRÉ/APL/FFF)