ARBITRAGE

Cyril Gringore : « Ce fut exceptionnel »

mercredi 4 janvier 2023 - 15:06 - Philippe MAYEN
Cyril Gringore arbitrage

L'heure de la retraite a sifflé pour Cyril Gringore. L'arbitre-assistant international, fidèle équipier de Clément Turpin, a rangé son drapeau après une carrière exemplaire et bien remplie.

À 50 ans, Cyril Gringore a refermé le 28 décembre dernier, au soir du match de Ligue 1 Paris SG-Strasbourg, une carrière d'arbitre commencée en 1990, en Seine-Maritime. Quelques jours plus tôt, il avait vécu au Qatar sa deuxième Coupe du monde au sein du trio qu'il composait depuis 2016 avec Clément Turpin et Nicolas Danos.
District, ligue, FFF (2000), UEFA (2007), FIFA (2010), le Normand, devenu assistant en 2002, licencié au FC Rouen, aura gravi tous les échelons en trois-trois ans de parcours, accumulant les désignations au plus haut niveau : Coupes du monde U17 en 2015 et 2017, Euros 2016 et 2020, Coupes du monde 2018 et 2022, finale de la Ligue Europa 2021, finale de la Ligue des champions 2022, Coupe du monde des clubs 2022.
Récompensé par deux Trophées UNFP de meilleur arbitre-assistant de Ligue 1 (2021 et 2022), Cyril Gringore est désormais un retraité de l'arbitrage heureux et comblé.

« La Coupe du monde au Qatar a sifflé la fin de votre carrière internationale. Quel souvenir en garderez-vous ? 
On est resté cinq semaines, avec des conditions de vie, d’entraînement et d’encadrement assez exceptionnelles. Les trois matches sur lesquels nous avons été désignés se sont très bien passés - Uruguay-Corée du Sud, Equateur-Sénégal et le 8e de finale Brésil-Corée du Sud -, nos prestations ont été plutôt abouties. Nous avons aussi eu la chance d’assister à d’autres matches en tribune, notamment trois rencontres des quarts de finale, dont France-Angleterre. La qualification des Bleus pour les demi-finales a mis fin au parcours de tous les arbitres français. C’est toujours un peu décevant, on est toujours prêt à aller plus loin mais c’est la règle, on la connaît, et rien ne nous dit que la FIFA aurait encore fait appel à nous ensuite. On ne saura jamais. On est fier d’avoir réalisé une belle Coupe du monde et heureux que la France se soit hissée jusqu’en finale, une bonne chose pour la Fédération. À titre personnel, finir ma carrière internationale sur ce Mondial restera un grand souvenir.

Il vous restait un dernier rendez-vous à honorer en Ligue 1 lors de Paris SG-Strasbourg, le 28 décembre. Un moment sans doute particulier ? 
J’avais émis le souhait de faire un dernier match en France car il me tenait à cœur de terminer devant ma famille et mes proches. Pour moi qui suis normand, Paris était parfait en termes de logistique. En sachant aussi qu’il s’agirait de mon 400e match en Ligue 1, un beau compte. Qui plus est au Parc des Princes, un stade mythique. À l’échauffement, je me suis dit que je foulais cette pelouse pour la dernière fois, le sentiment était un peu bizarre. Et puis dans le vestiaire, au moment de la préparation, j’ai essayé de ne pas trop penser à ça, à toutes ces choses que je ferai plus, je me suis mis dans le match. Mais au coup de sifflet final, là j'ai pensé : cette fois, je range définitivement les crampons et le drapeau. En fait, j’en prends réellement conscience aujourd’hui, lorsque je vois les collègues sur le terrain. Je ressens quelque chose.

Jamais je n’aurais pensé vivre une telle carrière, aller aussi haut. Merci à l'arbitrage de m'avoir permis de vivre cela

 

Que vont devenir sans vous vos deux compères, Clément Turpin et Nicolas Danos ?
Ils ne sont pas perdus [rire]. Benjamin Pages [assistant fédéral 1, 36 ans] va les rejoindre et compléter le trio. Ma succession avait été préparée. Les voir sur leur prochain match de Ligue 1 sera certainement un moment particulier, mais c’est comme ça.

Cyril Gringore au côté de Clément Turpin et Nicolas Danos à la Coupe du monde 2022 (photo Anthony DIBON/ICON SPORT).

Et vous, que devenez-vous désormais ? La page de l'arbitrage est-elle définitivement tournée ? 
Depuis le 2 janvier, j’ai repris mes fonctions dans la Police nationale, j’ai récupéré le poste que j’occupais à l’école de police de Oissel, près de Rouen. Après avoir été formateur de nombreuses années, je suis désormais attaché à la sécurité du site. Mais non, l’arbitrage n’est pas totalement terminé pour autant. Je ne serai plus sur les terrains mais je reste en fonction pour des désignations à la VAR en Ligue 1 ainsi que pour des observations de matches pour la DTA.

Que retenez-vous de votre long parcours d'arbitre ? 
L’arbitrage m’a beaucoup apporté. Pendant trente-trois ans, cela a été une grande aventure sportive et humaine, depuis mes débuts en district jusqu’au plus haut niveau professionnel, jalonnée de très nombreuses rencontres avec des joueurs, des entraîneurs, des dirigeants, et de voyages dans une quarantaine ou une cinquantaine de pays, que je n’aurais jamais visités autrement. Cela forge le caractère. Merci à l’arbitrage de m’avoir permis de vivre cela et merci aux personnes qui m’ont permis de rentrer dans l’arbitrage lorsque j’avais 17 ans. Je n’imaginais pas les perspectives que l’arbitrage peut ouvrir. 

On a besoin de susciter des vocations. Si mon parcours peut donner envie au jeunes, tant mieux !

 

Votre palmarès est bien garni. Deux Euros, deux Coupes du monde, deux finales européennes, entre autres. 
Jamais je n’aurais pensé vivre une telle carrière, aller aussi haut. Ce fut exceptionnel. La finale de la Ligue des champions 2022 au Stade de France et le barrage intercontinental Pérou-Nouvelle-Zélande en novembre 2017 à Lima resteront mes meilleurs souvenirs. Les deux Coupes du monde occupent une place à part, aussi. Un match de Mondial est tellement fort à vivre, avec des sensations que l’on ne ressent pas sur les autres matches quand on rentre sur le terrain. Parmi mes bons souvenirs, j’ai officié dix années avec Freddy Fautrel [aujourd'hui Conseiller technique régional en arbitrage en Ligue de Normandie], et deux autres avec Rudy Buquet avec notamment une Coupe du monde U17 au Chili.

Pas de regrets ni de mauvais souvenirs ? 
Je n'ai pas connu de JO. Je ne faisais pas encore équipe avec Clément et Nicolas lorsqu’ils ont été sélectionnés pour Rio en 2016, je les ai rejoints lorsque Frédéric Cano a décidé d’arrêter après ces Jeux. Mais ce n’est pas vraiment un regret. Et honnêtement, je n’ai pas réellement de mauvais souvenir. J’ai eu une carrière linéaire, avec une progression assez constante, sans rétrogradation de catégorie. J’ai seulement connu une petite déception en 2011 lorsque j’ai perdu mon statut d’international mais cela n’a duré qu’une année. Avec le recul, ça n’était pas très grave.

Votre neveu, Jules, est Jeune Arbitre de la FFF, votre fils Victor officie en Régional 2 seniors. Le relais est assuré ? 
Voilà, la relève familiale est prête ! En tant que membre de la Commission Régionale d’Arbitrage de la Ligue de Normandie, en charge des jeunes, j’essaye de rendre à l’arbitrage tout ce qu’il a pu m’apporter. On manque tellement d’arbitres actuellement. On a besoin de susciter des vocations. Si mon parcours peut donner envie au jeunes, tant mieux ! » 

À lire ou relire : Gringore-Danos, et deux qui font trois

 

Hommage à Johan Hamel

Un hommage a été rendu à Johan Hamel lors de la 16e journée de Ligue 1, les 28 et 29 décembre, ainsi qu'en Ligue 2. L'arbitre français est décédé le 16 novembre dernier à l'âge de 42 ans. Comme tous les capitaines et tous les arbitres, Clément Turpin, Cyril Gringore et Nicolas Danos ont revêtu à cette occasion un tee-shirt à sa mémoire lors de Paris SG-Strasbourg. 
« Le décès de Johan, que nous avons appris au Qatar en stage de préparation, nous a vraiment touchés, confie Cyril Gringore. Juste avant de partir pour la Coupe du monde, j’avais fait un match de Ligue 1 avec lui à Lille. On était ensemble sur le terrain. Ce fut son dernier match en tant que central. On a pris un coup de massue en apprenant sa disparition. Il faisait partie de la génération qui a connu la professionnalisation de l’arbitrage, on a traversé beaucoup de choses avec lui, on se côtoyait souvent. On est très triste. »

 

(Photo Sandra RUHAUT/ICON SPORT)

fédération française de football - FFF
Crédit Agricole logo EDF logo Nike logo Orange logo Uber Eats logo Volkswagen logo