RSO SANTÉ

FC SER, un but contre les addictions

mercredi 15 février 2023 - 14:28 - Richard LOYANT
FC Saint-Étienne-du-Rouvray

Depuis 2019, le FC Saint-Étienne-du-Rouvray s’est engagé dans un programme de prévention des addictions de toutes sortes pour sensibiliser à leurs risques ses jeunes licencié(e)s.

Jeux vidéo, tabac, cannabis, alcool… Comme nombre de clubs en France, le FC Saint-Étienne-du-Rouvray (Ligue de Normandie, District de Seine-Maritime) a constaté une consommation souvent banalisée et parfois excessive chez ses licencié(e)s, la plupart du temps liée à un défaut d’informations et de connaissances. Il a dès lors entrepris une démarche de prévention, de réduction des risques et de sensibilisation de ses jeunes (des U6 aux U18) et de leurs parents, se voulant ludique et surtout pas moralisatrice. Une initiative baptisée « Bien dans tes crampons » qui lui a valu d’être lauréat des Trophées Philipe-Séguin 2022 du Fondaction du Football dans la catégorie « Santé et environnement » et que raconte sa chargée de projet Sadia Salem-Henry.

 LE POINT DE DÉPART 
« Savoir comment réagir »

« Nos effectifs sont issus à 80 % des quartiers de la ville avec leur réalité, difficile, hélas touchés par le fléau de la drogue, du cannabis jusqu’à l’héroïne ou la cocaïne. Ce n’est pas arrivé chez nous mais en discutant avec des éducateurs d’autres villes où leurs gars sortent un peu les soirs avant les matches et arrivent le matin en état d’ébriété, il nous est apparu que l'on était pas à l'abri et qu’il fallait pouvoir gérer. On s’est dit que l’on avait une bonne connaissance de ce public, que l’on pouvait tous aider et, donc, que l’on pouvait être essentiel avec les soutiens de l’Éducation nationale et des centres sociaux de la ville. Il fallait que l’on puisse nous aussi donner des armes à nos enfants pour qu’ils soient en mesure d'effectuer leurs choix en connaissance des conséquences, mais également permettre à nos éducateurs de bien réagir quand un jeune ne venait plus parce qu’il avait trouvé d’autres passions pas forcément légales ou se présentait en état d’ébriété. » 

 LA PREMIERE ÉTAPE 
« On a choisi de former tout le monde »

« On est parti du Programme éducatif fédéral (PEF) et de sa thématique sur le dopage, même si elle ne correspondait pas complètement à nos besoins. On a démarré sans tabou pour traiter des addictions au sens large. Le but n’était pas de survoler, de seulement les présenter, mais de former nos éducateurs pour recueillir la parole et pouvoir orienter. On s’est rapproché de la coordinatrice "santé" de la ville, laquelle nous a mis en contact avec La Boussole, une association spécialisée avec une consultation et les ressources nécessaires pour accueillir si besoin un jeune et sa famille. On a ensuite choisi de former tout le monde, éducateurs, salariés, services civiques et bénévoles, pour avoir le même discours. On a tous nos représentations de ces addictions, nos propres expériences, et il est important d’être sur la même longueur d’onde. Désormais, nos éducateurs savent recueillir la parole et quelle posture adopter par rapport à un jeune. Ensuite, ils passent le relais à trois référents. Des spécialistes sauront mieux gérer derrière. » 

Une session de formation des éducateurs (photo FC SER).

 TRANSMETTRE LES MESSAGES 
« Se faire sa propre réflexion »

« C’est un cursus sur le long terme, comme pour l’apprentissage de la lecture où l’on commence tout petit jusqu’à lire des romans de trois-cents pages. On démarre à partir des U6 sur les compétences psycho-sociales qui permettent quand on grandit de savoir ce qui est bien ou mal et de se faire sa propre réflexion pour pouvoir dire non. Avec eux, on ne va pas parler d’addictions mais c’est déjà l’âge où l’on se moque des autres, où il faut apprendre à vivre avec, accepter les différences… La tolérance part de là, de l’envie de bien vivre ensemble et pour cela, il faut respecter tout le monde. On travaille là-dessus jusqu’à 11 ans à peu près. On commence aussi sur les moyens de réguler sa consommation d’écrans et, au fur et à mesure, on monte sur des thématiques plus importantes jusqu’aux U18 où l’on parle de nos comportements en soirées : est ce que je dis oui à la cigarette en sachant que je peux "tomber dedans", pareil pour le cannabis… Ou lorsque je fais un choix, ai-je bien vérifié qu’il n’affecte pas les autres, l'ai-je effectué en libre conscience de tout ce qu’il implique ? »

 DU JEU AU DÉBAT 
« On laisse la parole libre aux jeunes »

« Les approches sont faites par les jeunes : on leur donne un questionnaire et ils nous disent ce qu’ils en pensent, ce qui selon eux est bien ou pas. On a ensuite misé sur un jeu d’évasion numérique fourni par La Boussole. Il leur permet de jouer ensemble sur quatre thématiques : harcèlement et cyberharcèlement, consommations de jeux vidéo, d’alcool, de drogues et leurs effets. Ils sont enfermés dans un vestiaire avec pour but d’en sortir en ayant résolu les énigmes pour trouver un code, qui est le numéro national d’appel pour obtenir du soutien. Ils reviennent le surlendemain pour débattre avec nous et les professionnels afin de savoir ce qu’ils en ont pensé, ce qui peut être amélioré et faire leur retour sur leurs premières expériences. On sait que certains en ont eu mais on leur laisse la parole libre. »

 LE TRIANGLE CLUB-PARENTS-ÉCOLE 
« Tout le monde se côtoie, se parle et échange »

« Les parents et le milieu scolaire sont invités à des temps d’échanges où l’on fait venir les acteurs de la prévention. Ils leur donnent les outils, échangent sur ce qui marche chez l’un et pas chez l’autre pour trouver des trucs et des astuces : comment ne pas priver les enfants de sport quand ils ont fait des bêtises, comment réagir si notre fils ou notre fille nous dit untel fume, est-ce qu’il peut quand même venir à la maison… Depuis que l’on est dans ce triangle club-parents-école, nos jeunes savent qu’il y a une personne ressource, qu’ils vont trouver quelqu’un pour discuter si besoin et que tout le monde se parle, donc que les bêtises sont plus dures à faire. Elles ne sont pas inévitables mais comme tout le monde se côtoie, se parle et échange, il n’y a plus la barrière de se dire que la bêtise que je fais à l’école ou en club ne sera pas vue à la maison. Comme on a un projet de jeu sportif, on a un projet de valeurs et de dialogue avec un discours commun sur ces sujets. C’est pour cela, je pense, que nos jeunes se développent bien, citoyennement parlant. »

Le co-président du FC SER Laurent Byrotheau trophée en mains, encadré à sa gauche par Laura Georges, secrétaire générale de la FFF, et à sa droite par Sadia Salem-Henry (photo FONDACTION DU FOOTBALL).

 LE DISCOURS DE LA MÉTHODE 
« On prône la pleine conscience »

« Le piège à éviter est d’être moralisateur, vouloir bien faire en donnant des ordres. Un discours fondé sur l’interdiction et la sanction n’est pas la bonne approche. On ne peut pas être moralisateur alors que l’on a déjà tous eu nos expériences, qui sont aussi formatrices. On prône plutôt la pleine conscience, on donne les outils à l’ado et au jeune adulte : voilà ce qui va s’offrir à toi, à toi de savoir si tu veux ou pas mais ce sont tes choix. Quand on explique les conséquences, on responsabilise. La peur n’empêchera pas le danger, on leur donne des armes, à eux de se battre avec s’ils le souhaitent. Certains vont tester, d’autres non, le but étant de ne pas subir la pression du groupe. C’est ce que l’on essaie d’expliquer aux jeunes : chacun effectue ses propres choix, je ne peux pas obliger les gens à avoir les mêmes que moi mais je peux refuser d'en faire certains. Et si je "tombe dedans" et que je veux m’en sortir ou que j’ai un copain en train de "partir" et que je veux l’aider, voilà aussi les outils. Sans être obligé de prévenir les parents parce que c’est compliqué, que l’on ne veut pas passer pour "la balance" mais que l’on peut aller à tel endroit pour rencontrer des professionnels, que cela fera peut-être changer d’avis. C’est important de savoir qu’il n’y a pas que les parents pour écouter mais aussi plein d’autres gens et que tout le monde est bienveillant. » 

Les bonnes pratiques du football amateur

Avec cette série de belles réussites du football amateur, la FFF met à l’honneur les initiatives et actions engagées par ses clubs partout en France. De quartier ou ruraux, avec plus ou moins de licencié(e)s mais toujours la même passion des pratiquants, éducateurs et dirigeants, de tous âges et générations.

fédération française de football - FFF
Crédit Agricole logo EDF logo Nike logo Orange logo Uber Eats logo Volkswagen logo