Raphaël Reynaud : « Un match pour changer d’univers »
Le sélectionneur des Bleus raconte comment lui, son staff et ses joueurs abordent les deux rencontres qui peuvent envoyer les Tricolores au Mondial.
Les Bleus sont réunis depuis dimanche soir pour le dernier rassemblement de l’année. Un court passage au CNF Clairefontaine puis ils rallieront, dès lundi soir, Laval où un rendez-vous avec l’histoire les attend : une victoire contre la Slovaquie, jeudi (21h05, en direct sur FFFtv et L’Équipe Live) les enverrait pour la première fois en phase finale de Coupe du monde. À l’approche de cette échéance motivante, et d’un déplacement en Allemagne six jours plus tard, le sélectionneur Raphaël Reynaud fait confiance à son groupe pour « finir le travail ».
« Ce dernier rassemblement de l’année est-il le plus important de la saison ?
C’est celui qui va permettre de finaliser le travail de la saison et, bien évidemment, le travail d’un cycle depuis deux ans et demi. Le plus difficile est toujours de terminer le travail. D’un point de vue sportif, notre victoire en Croatie (2-1, le 10 octobre à Zagreb) était le match le plus important, car il nous permettait de rester en tête de notre groupe et de garder la main pour la qualification directe. C'est notre match le plus abouti. Ce résultat chez une grosse nation historique du futsal nous ouvre les portes. À nous de continuer d’ouvrir cette porte avec les deux dernières confrontations qui arrivent, contre la Slovaquie et en Allemagne.
Comment abordez-vous ce moment particulier, qui pourrait être historique pour le futsal français ?
Avec le staff, on va l'orienter forcément sur le contenu et sur le jeu. On est devant une échéance et un enjeu qui, quelque part, nous dépassent. Donc, si on commence à penser à ce que cette qualification peut amener derrière, notamment au niveau du développement de la discipline, voire de la médiatisation potentielle, on peut être dépassés par cet enjeu. Nous, on est sur le jeu. On sera sur une préparation classique liée à notre projet de jeu, aux problèmes posés par l’adversaire, au contenu que l’on veut proposer pour atteindre notre objectif.
La liste pour la Slovaquie et l'Allemagne
Il y a beaucoup d’impatience autour de ce match… Sentez-vous un élan au sein de votre groupe ?
Très clairement. Le groupe est indéniablement mobilisé sur cette échéance. J’ai le sentiment que, depuis la fin du match en Croatie, au moment où on s’est retrouvés dans le vestiaire, les joueurs ont fait ce qu’ils ont dit à ce moment-là : ils se sont entraînés davantage, ils sont plus concentrés, ils sont totalement investis. En gros, ils se sont donnés encore plus de moyens de réussite.
« L’idée est vraiment de donner la possibilité aux joueurs qui ont participé à cette campagne de finir le travail. On est sur une dynamique positive (...) On a des joueurs à l’étranger qui se portent de mieux en mieux (...) On a aussi des joueurs français dans notre championnat qui portent leur équipe. »
Cette victoire en Croatie compte tenu des circonstances, des absences notamment du capitaine et meilleur buteur de l’histoire des Bleus Adbessamad Mohammed suspendu, vous donne-t-elle un surcroît de confiance ?
Depuis le début, on a une confiance absolue en ce groupe et en nos valeurs. On reste confiants, sereins, tout en étant évidemment en alerte pour pouvoir maintenir ce niveau de performance. Il n’y a pas de surprise. C’est un groupe qui a des valeurs morales, des qualités de compétiteurs hors-norme. On est juste nous-même. Et avec le staff, on est là pour mettre tout ça en musique.
À Zagreb, en octobre, Souheil Mouhoudine et les Bleus ont battu la Croatie (2-1, photo PIXSELL / ICON SPORT).
Vous avez convoqué dix-sept joueurs pour ce rassemblement, un groupe très stable. Tout le monde est sur le pont ?
Le maître-mot de la liste, c’était d’offrir la possibilité aux acteurs de terminer le travail. C’est à eux de jouer. On y a juste ajouté le petit plus que constitue le retour de Moussa Haddad, que l’on voulait revoir (convoqué pour le Tournoi du Maroc au printemps, il s’était blessé avant de pouvoir honorer sa première sélection). Il est en très grande forme, il va pouvoir nous offrir une solution supplémentaire, notamment sur sa qualité de passe puisqu’il est actuellement meilleur passeur du championnat. L’idée est vraiment de donner la possibilité aux joueurs qui ont participé à cette campagne de finir le travail. On est sur une dynamique positive. Depuis notre dernier match en Croatie, les Lavallois ont représenté la France en Ligue des champions parmi les douze meilleurs clubs européens, ce qui n’est pas rien pour une première participation avec une ossature d’internationaux français. On a des joueurs à l’étranger qui se portent de mieux en mieux, le meilleur exemple étant Mamadou Touré qui a de plus en plus de temps de jeu avec le FC Barcelone, l’un des meilleurs clubs d’Europe. Il a marqué son premier but et s’est qualifié pour la phase finale de la Ligue des champions. On a aussi des joueurs français dans notre championnat qui portent leur équipe. Je trouve la saison de Sid Belhaj exceptionnelle. Steve Bendali est une valeur sûre de Nantes. Je pourrais en citer d’autres… Les clubs profitent de la dynamique de l’Équipe de France et du travail effectué par les joueurs et nous, on profite de la dynamique des clubs. C’est gagnant-gagnant pour le futsal français.
« Sur les quatre matches que l’on a joués dans ce tour Élite, on a toujours été menés, quasi systématiquement. On est donc habitués, c’est une poule très difficile. Les Slovaques viennent pour gagner car seule une victoire leur permettrait de rester en vie »
La Slovaquie est la seule équipe à vous avoir pris des points dans le groupe C (4-4, en septembre) et elle n’est pas encore éliminée…
Soyons clairs : c’est un match très, très difficile qui nous attend. Mais j’ai une telle confiance en notre équipe, en notre projet, que je ne suis pas inquiet. Simplement, nous avons des références. On a des points sur lesquels on s’appuie et sur lesquels on va s’appuyer encore. À nous de trouver et de donner les solutions aux joueurs. On n’est pas en terrain inconnu. Quand je dis que c’est un match très difficile qui nous attend, c’est que pour l’instant, sur les quatre matches que l’on a joués dans ce tour Élite, on a toujours été menés, quasi systématiquement. On est donc habitués, c’est une poule très difficile. Les Slovaques viennent pour gagner car ils savent que seule une victoire leur permettrait de rester en vie dans cette compétition. Il y a des joueurs d’un immense talent dans cette équipe. Moi, je parle uniquement du sportif et sur cet aspect-là, on aura affaire à un adversaire qui sera là pour nous embrouiller. Le futsal regorge de possibilités pour embrouiller un match et faire en sorte d’aller gagner là où on ne nous attend pas. Cela va donc être un match difficile mais je suis confiant.
Le capitaine Abdessamad Mohammed lors du match aller en Slovaquie (photo Ludovic BRUNEAU / FFF).
L’enjeu est très clair : il manque deux points pour la qualification directe et il reste deux matches. Cela vous laisse un joker ?
Pour moi, il n’y a qu’un seul match et il y en aura ensuite un second. C’est comme cela que j’aborde les choses. On est focus sur la Slovaquie et on le sera sur l’Allemagne ensuite, quel que soit le résultat du premier. Je n’ai pas envie de parler de points, de calculs. J’ai envie d’envisager deux victoires et de préparer les deux matches distinctement. Tout au long de cette longue campagne qualificative, on a su rester concentrés sur notre solidité défensive, sur notre préparation athlétique. On s’est construit en tant qu’équipe imbattable, sans être la meilleure équipe pour autant. C’est le fil conducteur de notre parcours et on compte bien ne pas le perdre au moment où l’on voit la ligne d’arrivée aussi proche.
Vous êtes devant une forme d’inconnu puisque c’est la première fois que l’Équipe de France est en position de se qualifier pour une Coupe du monde…
Encore une fois, on va juste aborder les choses simplement et sereinement, comme ce que l’on a déjà réalisé. C’est-à-dire jouer un match de futsal de haut niveau contre une équipe de haut niveau. Et ça, on sait faire ! Tout ce qui en découle, on le mesurera après, on fera les choses après. Mais en ce qui nous concerne, on est sur la préparation d’un match. Certes, dont on est conscient qu’il peut nous faire changer d’univers mais ça, ce sera la cerise sur le gâteau.
Jeudi à Laval, vous jouerez pour la sixième fois à guichet fermé. Il y aura une grande attente autour de cette rencontre…
Soyons fiers et reconnaissants envers le public qui nous suit depuis le début. On sent une émulation incroyable. On aurait pu largement remplir, peut-être, deux Espace Mayenne sur ce match. On est portés par la dynamique populaire également. C’est très important et agréable de jouer dans notre petit chaudron, comme disent les joueurs.
À titre personnel, comment allez-vous mettre de côté l’effervescence ambiante ?
J’ai juste travaillé toute ma vie pour arriver à ce match et à cette échéance-là, cela me semble donc tellement simple d’arriver et de prendre le plaisir que l’on doit prendre avec mon staff et les joueurs… On va vivre des moments simples et merveilleux. On se prépare à ne pas être submergés, il n’y a aucune raison. On mesure l’enjeu mais on est vraiment concentrés sur le jeu. C’est juste du bonheur et du plaisir. »
