ÉQUIPE DE FRANCE

Alphonse Areola : « Continuez à rêver »

vendredi 29 décembre 2023 - 11:37 - Claire GAILLARD
Alphonse Areola

Ancien pensionnaire de l’INF, le gardien des Bleus, champion du monde 2018 et finaliste du Mondial 2022, évoque la formation française à travers ses années à Clairefontaine. Et livre quelques conseils pour les jeunes générations.

Comme beaucoup, Alphonse Areola l’ado passait devant le Château avec envie. Il formulait un vœu : celui de gagner le droit d’y entrer un jour en tant que joueur de l’Équipe de France. C’est dans le salon du Château justement que le gardien des Bleus (5 sélections) attendait, mardi 14 novembre 2023, FFF.FR. En ce jour anniversaire des 50 ans de la formation française, le joueur de West Ham s’est remémoré son passage à l’Institut national du football (INF) avec une grande émotion. Des épreuves de détection aux rencontres marquantes en passant par le triple projet et les valeurs inculquées, Areola présente cette école de la vie comme une étape clé de sa construction en tant que joueur et homme. Passé par les sélections jeunes (U17, U18, U19, U20, Espoirs) avant d’atteindre les A, le double champion du monde (2018 et U20 en 2013) salue la qualité de la formation en France « qui produit chaque année des top joueurs ». À l’image de Warren Zaïre-Emery, cite-t-il, nouveau venu chez les Bleus et de treize ans son cadet !

« Cadre des Bleus, deux Coupes du monde remportées, avec les U20 en 2013 puis les A en 2018 et une place de finaliste en 2022, vous êtes l’un des modèles de la formation française qui réussit ? 
(Il rit) Ce serait un peu prétentieux de dire que je suis un modèle mais c’est toujours gratifiant de parler de cette formation française. Elle est de grande qualité, dispose de très bons formateurs qui nous ont aidés à franchir les étapes footballistiquement ou humainement.

Il y a 14 ans vous empruntiez le chemin qui menait au bâtiment de l’INF et ces dernières années, vous séjournez au Château avec l’Équipe de France. 
Les souvenirs affluent toujours, ils sont gravés au fond de moi et des autres pensionnaires. Ce sont des moments importants de notre adolescence, c’est là où tout a commencé. À l’époque, on passait devant le Château, on avait envie de le toucher mais on ne pouvait pas s’en approcher. On avait cette crainte de se faire disputer ! On se retrouve quelques années plus tard à l’intérieur et on se dit qu’il y a eu un long chemin parcouru.


En 2004 avec sa promotion de l'INF (en haut à gauche) et Franck Raviot, son formateur (photo Archives FFF). 

Quel est votre souvenir le plus marquant de l’INF ? 
C’était pendant les tests lors du premier jour de détection. On arrive à Clairefontaine et on sait que c’est le jour J, celui où il faut être bon pour prétendre à être l’un des joueurs sélectionnés pour la prochaine génération. La première image que j’aie en tête, c’est cette Coupe du monde à l’entrée qui impose tout de suite le respect et qui te montre que l’Équipe de France est l’une des meilleures nations au monde.

Podcast : Alphonse Areola, la vie de château

Dans quel état d’esprit étiez-vous ce jour-là ?
Quand je passe les tests de l’INF, je joue encore aux Petits Anges du 7e arrondissement de Paris, je n’avais pas encore côtoyé les meilleurs de ma génération. Le fait d’arriver ici, c’était déjà quelque chose d’impressionnant et à l'idée de se frotter à des jeunes qui avaient l’habitude de jouer contre le PSG des moins de 13 ans par exemple, j’ai ressenti une petite pression mais au final, quand on est sur le terrain, on pense à ce qu’on sait faire. Pour moi, ça s’est bien passé. 

« Si Franck Raviot n’avait pas été là, j’aurais été un peu plus fou, complètement différent. J’ai gagné en maturité très vite. Dès l’âge de 12-13 ans, il a fallu être autonome. Franck nous a appris cette autonomie. »

 

Vous y avez rencontré Franck Raviot que vous côtoyez aujourd’hui en bleu. Quel rôle a-t-il joué dans votre carrière et quelle relation avez-vous ? 
Dès le début, ça a été comme un deuxième père, un mentor qui était là pour nous mettre sur le droit chemin footballistiquement et humainement surtout. C’est sur ce plan-là qu’il a été important pour moi comme pour beaucoup. Je pense que s’il n’avait pas été là, j’aurais été un peu plus fou, complétement différent, j’ai gagné en maturité très vite. Dès l’âge de 12-13 ans, il a fallu être autonome. Franck nous a appris cette autonomie.


Le CNF Clairefontaine lors des 50 ans de la formation française en novembre (photo FFF).

Le triple projet - sportif, éducatif, citoyen - a-t-il forgé le joueur et l’homme que vous êtes ? 
Oui, c’est exactement ça. Les formateurs ont été présents dès le début, ils ont posé le cadre, on a su suivre ces règles et être irréprochables pour montrer le bon exemple.

« On a tous été jeunes et on a tous fait des erreurs. On en fera encore, c’est humain, mais il y avait un cadre à respecter et on a essayé de ne pas trop en sortir. »

 

À cet âge-là, on commet parfois des erreurs et c’est normal. L’INF c’est aussi accompagner les jeunes dans cet apprentissage de la vie… 
On a tous été jeunes et on a tous fait des erreurs. On en fera encore, c’est humain, mais il y avait un cadre à respecter et on a essayé de ne pas trop en sortir.

Aviez-vous un joueur comme modèle ? 
Quand je parlais de l’Équipe de France et de Clairefontaine, c’était Zinédine Zidane, Thierry Henry, William Gallas… Zidane parce que j’ai commencé le football après 1998. J’ai regardé la finale chez moi avec mes parents dans mon petit appartement à Paris. On avait acheté le maillot de l’Équipe de France après la victoire. Pour moi, c’était le début de la passion foot.

Avez-vous une anecdote drôle sur votre passage à Clairefontaine que l’on peut raconter ? 
Ça va être drôle pour vous mais ça l’était moins pour nous, les gardiens de but (rires). On avait fait une bêtise à l’école, on n’avait pas voulu se balancer entre nous, du coup, on avait tous été punis. Après une réunion de gardiens, on est allé ramasser tous les déchets, tous les mégots qu’il y avait sur le Centre technique national à Clairefontaine, cela nous avait pris quasiment deux heures de faire le tour de toutes les installations pour ramasser le moindre petit papier ! Franck nous avait mis la pression pour qu’il ne reste plus rien. Quand on parle de projet citoyen, c’est une bonne illustration.


Photo de groupe de la promotion gardiens-gardiennes Alphonse Areola à l'INF Clairefontaine (photo Archives FFF).

Lorsque vous étiez à l’INF, il y avait également la section féminine avec l'actuelle internationale française Viviane Asseyi. Vous souvenez-vous d'elle à l’époque ? 
Je m’en souviens très bien car on se suit avec Viviane. On était à Clairefontaine en même temps, on joue aujourd’hui pour le même club : West Ham. A chaque fois qu’on se croise, on rigole, on a de grands sourires, on se remémore les bons souvenirs de l’INF et du CNFE, on était un groupe. Il n’y avait pas les garçons d’un côté, les filles de l’autres, c’était déjà la mixité. On était dans la même classe au collège puis au lycée à Rambouillet. On se protégeait les uns les autres.

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Ce football féminin était alors moins connu et populaire… 
En effet, c’est top qu’aujourd’hui il soit davantage mis en avant. À l’époque, c’était plus difficile pour les joueuses d’exister, de se montrer, d’être visibles, d’avoir des sponsors ou de la médiatisation. Désormais tous les moyens à l’échelle de la Fédération sont mis à leur disposition, les matches sont télévisés et elles jouent bien.

« L’Équipe de France féminine peut aller loin. Au-delà du facteur performance, il y a le facteur chance. Quand la réussite est là, il faut la garder précieusement et se laisser porter. On espère tous que le football féminin français va bientôt remporter le premier titre majeur de son histoire. »

 

Il ne manque plus qu’un titre. Avez-vous un conseil à donner aux Bleues ? 
Ça se joue sur des détails. L’Équipe de France féminine peut aller loin, elle l’a déjà fait mais au-delà du facteur performance, il y a aussi le facteur chance. Quand la réussite est là, il faut la garder précieusement et se laisser porter. On espère tous que le football féminin va bientôt remporter le premier titre majeur de son histoire. On voit qu’elles ont un collectif qui vit très bien, il faut qu’elles continuent à persévérer, travailler comme elles le font et ça viendra j’en suis sûr.

Quel conseil donneriez-vous aux jeunes générations ? 
Continuez à rêver ! C’est ce qui m’a porté de rêver et de me fixer des objectifs. Être sérieux aussi mais pas trop non plus. Profiter surtout parce que ça passe super vite. Quand on me disait de profiter il y a douze ans, je rigolais et dans ma tête, je me disais : ‘‘J’ai encore le temps’’. Aujourd’hui, je me retrouve à leur donner le même conseil (il sourit). Garder vos rêves, c’est ce qui vous permettra d’avancer.


Tout sourire avec son capitaine chez les Bleus Kylian Mbappé, à la veille de Gibraltar-France en juin dernier (photo Simon MORCEL / FFF). 

La formation française c’est aussi les centres de formation des clubs français. On ne peut pas vous parler de formation sans évoquer le PSG. Quel regard portez-vous sur vos années parisiennes ?
La formation française est incroyable et les clubs font un boulot remarquable. On produit chaque année des top joueurs. Il n’y a qu’à voir Warren (Zaïre-Emery) du PSG qui vient de nous rejoindre chez les Bleus. À 17 ans, intégrer l’Équipe de France, cela prouve que la formation française est bien là et qu’elle est performante à tous les niveaux. Humainement, on voit que c’est quelqu’un de très posé, d’humble. Il faut continuer à mettre en avant cette formation à la française ! »

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