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Asseyi – Lakrar : « Cela n’arrive qu’une fois »

mercredi 15 novembre 2023 - 17:24 - RÉDACTION
Viviane Asseyi Maëlle Lakrar

Viviane Asseyi et Maëlle Lakrar évoluent ensemble sous le maillot bleu après être passées par l’INF. Retour croisé sur des expériences vécues à sept ans d’intervalle.

Elles furent toutes les deux pensionnaires de l’Institut national du football (INF) et évoluent aujourd’hui ensemble sous le maillot bleu (photo principale, avant le Mondial 2023). Sept promotions les séparent mais les mêmes souvenirs les rassemblent. L’une a vécu ces années à Clairefontaine de 2008 à 2010, l’autre à l’INSEP de 2015 à 2018. Leurs histoires sont différentes mais leur finalité est la même : l’Équipe de France Féminine. Viviane Asseyi et Maëlle Lakrar racontent « leur » INF.

La fiche de Viviane AsseyiLa fiche de Maëlle Lakrar

« Si vous aviez un souvenir, une rencontre ou une anecdote ayant marqué votre passage à l'INF, quel serait-il ?
Viviane Asseyi : Je dirais Philippe Breteau, qui fut mon coach pendant mes deux années là-bas. Il a fait évoluer mon football mais il m’a aussi faite évoluer en tant que femme. 

Maëlle Lakrar : Même chose pour moi, mon premier coach, Didier Christophe. Il m’a fait progresser dès ma première année à l’INF. J’étais très jeune quand je suis arrivée et il m’a directement prise sous son aile. 

Viviane Asseyi au premier rang à la droite de Philippe Breteau avec sa promotion de l’INF en octobre 2009 (photo Archives FFF).

Comment intégrez-vous l’INF ?
V. A. : J’étais très insouciante à l’époque. Premièrement, je pensais que Clairefontaine n’était que pour les garçons. J’ai passé les tests de détection lors des rencontres « interligues » à Vichy, on était cinquante présélectionnées mais il n’y avait que douze places pour Clairefontaine. Mais je ne me rendais pas compte de l’enjeu, j’y allais pour kiffer. Quand j’ai reçu la lettre qui m’annonçait que j’avais été acceptée à l’INF, ma vie a changé. Je me suis dit : ''En fait, c’est vraiment ce que je vais faire''. Je me souviens que ma mère pleurait, elle se disait : ''Ma fille a 14 ans et elle va partir''. Moi, je m’en moquais (rire). Je voulais juste partir et jouer au foot. 

Saviez-vous ce qu’était Clairefontaine à ce moment-là ?
V. A. : Je savais que j’allais dans un endroit pour jouer au foot, aller à l’école et refaire du foot (rires). Je n’ai pas du tout stressé pour les tests, j’y allais pour tenter ma chance, vraiment en toute insouciance. 

Et vous Maëlle ?
M. L. : On a plus ou moins le même parcours. J’ai fait les « interligues » avec la Ligue Méditerranée. On est allées faire un tournoi à Bordeaux, les sélectionneurs étaient là. À la fin de mon match, ils sont venus me voir pour me dire que j’étais présélectionnée pour les tests à Clairefontaine. On est cent à les avoir passés là-bas et une douzaine à avoir finalement intégré l’INF à l’INSEP.  

Maëlle Lakrar (à droite) en match de tour Élite de l’Euro contre la Russie avec la sélection U17 féminine, en mars 2017 pendant sa période INSEP (photo Hervé GALAND / Ligue de Méditerranée / FFF).

Maëlle, vous entrez à l’INF sept ans après Viviane, le foot féminin a beaucoup évolué sur cette période. Aviez-vous toutes les deux des modèles dans le football féminin qui vous ont donné envie d’intégrer l’INF ?
M. L. : Je suivais énormément le foot et il y avait des joueuses que j’aimais bien. J’étais allée à Clairefontaine pour voir un entraînement de l’Équipe de France féminine. Je dois avoir des photos avec Wendie Renard, Louisa Necib, Eugénie Le Sommer... Et moi, j’étais encore un bébé ! 

V. A. : Franchement, dans le foot féminin, je ne connaissais que (la Brésilienne) Marta. Je la trouvais très forte, mais c’était la seule que je connaissais. Mon idole, c’était Zinédine Zidane, c’est lui qui m’a donné envie de jouer au foot. Et quand j’ai entendu ''Clairefontaine'', j’ai entendu ''Équipe de France''. Je me suis dit : ''C’est là où Zidane allait tout le temps quand il était en sélection !'' 

Justement, Viviane, vous étiez basée à Clairefontaine même. Est-ce que la proximité physique avec les équipes de France, notamment matérialisée par le Château que vous voyiez tous les jours, vous a tout de suite donné l’ambition de rejoindre les Bleues ? Ou est-ce arrivé au fil du temps ?
V. A. : Pour aller à la cantine depuis le bâtiment où nous étions logées, il fallait passer devant le Château. Je le regardais tous les jours ! Je me disais que j’étais obligée d’y aller un jour. On était chez nous au Centre, on vivait là-bas et tous les jours, on voyait le Château et c’était… notre rêve. Il fallait travailler dur pour y arriver mais, finalement, je dirais que c’était ma motivation quotidienne. 

Maëlle, vous aviez un fonctionnement différent à l’INSEP. Avez-vous pu échanger avec les grands champions qui s’entraînent là-bas ?
M. L. : Déjà, dans ma classe, nous étions mélangées avec beaucoup de sportifs de différentes disciplines : des basketteurs, des nageurs, des tennismen... On allait à leurs entraînements, eux venaient aux nôtres. C’était beaucoup d’échanges. Une rencontre m’a marquée, celle avec Ladji Doucouré (champion du monde 2005 du 110 m haies et du relais 4 x 100 m). Il venait souvent manger avec nous au self. 

Face à face lors d’un entraînement de l’Équipe de France en juin dernier (photo Simon MORCEL / FFF).

Est-ce dur l’INF ? D’un point de vue sportif mais aussi psychologique ?
V. A. : Je savais finalement que c’était plus dur pour ma mère que pour moi parce que ce n’est pas facile de laisser son enfant à 14 ans, de ne pas la voir tous les jours mais… Je pense que j’ai un problème (rires). Pour moi, ça ne l’était pas. Je savais que j’allais voir ma famille le week-end et dans ma tête ce n’était que foot, foot, foot. Sinon, je me souviens des côtes. Quand on devait monter les côtes en courant pour l’entraînement, ça, c’était dur (rires). Le foot aussi était dur mais, en fait, tu apprends. Tu n’as pas le choix, tu fais. 

M. L. : De mon côté, le plus dur, c'était les voyages. Je m’entraînais la semaine à l’INSEP mais je jouais pour l’Olympique de Marseille. Je devais donc prendre l’avion tous les vendredis et tous les dimanches. Faire les allers-retours toutes les semaines, ne pas être 100 % avec ton club et ne venir que pour les matches c’était un peu compliqué. Sinon, ce sont trois belles années passées là-bas ! C’était vraiment kiffant et une belle aventure. 

Diriez-vous qu’il y a un esprit INF ? Êtes-vous toujours en contact avec vos camarades de promotion ?
V. A. : Oui ! Nous étions dans la même classe avec les garçons de l’INF. J’étais dans la promotion d’Alphonse Areola notamment et aujourd’hui, on est dans le même club (West Ham FC) ! Il y avait Raphaël Guerreiro aussi ! Il faut imaginer ça : on était tous les deux fans de Cristiano Ronaldo, on en parlait et, en 2016, il gagne un Euro avec lui ! Je lui avais envoyé un message à ce moment-là parce que c’était inimaginable quand nous étions petits. Bref, j’ai gardé contact avec beaucoup de monde, aussi avec ceux ou celles qui n’ont pas trop percé. Nous avions vraiment vécu un truc de malade quand nous étions là-bas, tous ensemble. En fait, on est liés à vie avec ce que l’on a vécu là-bas. 

Vous étiez jeunes, en internat avec d’autres camarades… Y’a-t-il une bêtise avouable à raconter ?
V. A. : J’en ai plein mais je vais en choisir une que je peux raconter ! Un jour, nous étions à l’entraînement sur le terrain synthétique couvert. Le coach était en train d’expliquer l’exercice mais je ne l’écoutais pas : je jonglais, je jouais avec le ballon, j’aimais trop ça ! Une fille me dit : ''Allez, on fait le jeu de la barre''. Moi, évidemment je dis oui ! Je prends le ballon, je tire, je rate complètement et bien entendu, la balle frappe l’arrière de la tête du coach et je peux vous dire que j’avais vraiment tiré fort. Je crois qu’il en pleure encore ! 

M. L. : Nous avons un très grand internat et on est devenues des pros du « ventre-glisse ». Chaque fin d’année et de saison, on fermait les portes et tout le long du couloir, on mettait du savon et voilà… on faisait du « ventre glisse » (rires)

Contre l’Uruguay au Tournoi de France en février 2023 (photo Sindy THOMAS / FFF).

Un conseil à donner à une jeune qui voudrait intégrer l’INF ?
M. L. : Il faut poursuivre ses rêves. Si on a la chance d’être prise dans une aventure comme celle-là, on ne peut qu’accepter. C’est vraiment quelque chose à faire et qui n’arrivera qu’une seule fois dans sa vie. 

V. A. : Comme Maëlle le dit, il faut vivre ses rêves et ne pas écouter les autres qui essayent de te décourager. Évidemment il faut écouter ses parents mais il faut aussi les rassurer, il faut se dire que ce sont de très belles expériences qui n’arrivent qu’une fois. »

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