LA SAGA DE L'EURO

Lilian Thuram (Euro 2008) : « L’équipe n’était pas à la hauteur »   

samedi 22 mai 2021 - 09:30 - Philippe MAYEN
Equipe de France

Avec un nul et deux défaites en phase de groupes, l’Euro 2008 en Autriche et en Suisse a tourné court pour les Bleus, vice-champions du monde 2006. Une contre-performance vécue de l’intérieur par l'ancien défenseur international qui revient sur son quatrième et dernier Euro. 

« Quand on a connu le meilleur avec le titre européen en 2000, que dire de l’Euro 2008 ? 
2008 ? C’est un très mauvais souvenir... 2004, déjà, me laisse un mauvais souvenir aussi, avec une élimination en quarts de finale (défaite 0-1 contre la Grèce, future championne d’Europe). Mais là... De toute façon, à partir du moment où l’on ne gagne pas, c’est un mauvais souvenir ! Quand on est joueur professionnel, on est éduqué à ne savourer que la victoire.

La fiche de Lilian Thuram

Avec désormais beaucoup de recul, comment expliquer cette contre-performance ?
Je n’ai plus d’interrogations depuis longtemps à ce sujet. Sur un plan collectif, nous n’avions pas une équipe à la hauteur de la situation. Tout simplement. Sinon, on ne se serait pas fait éliminer au premier tour. Et puis, si je fais une lecture personnelle de cette phase finale, je savais plus ou moins ce qui allait se passer : j’arrivais à la fin de ma carrière, je jouais très peu avec mon club (le FC Barcelone) et je n’étais pas en condition physique pour disputer des matches rapprochés. Je m’en étais entretenu avec le coach avant. Lorsque la récupération se fait plus difficilement, l’enchaînement des rencontres devient catastrophique. C’est ce que j’ai vécu dans ce championnat d’Europe.

Je ne savais pas que je venais de jouer mon dernier match.

 

Dès le premier match contre la Roumanie (0-0, photo ci-dessous), l’Équipe de France a suscité des inquiétudes.
Cela n’est pas tout à fait vrai. Le premier match d’un tournoi final est toujours très difficile et très particulier. On sait qu’il faut éviter la défaite et cela engendre une pression sur les deux équipes, qui ont du mal à se relâcher. En règle générale, les premiers matches ne sont jamais très bons. On le constate souvent dans les grandes compétitions, le contraire est assez rare. Perdre le premier match complique tout de suite les choses. Celui contre la Roumanie a donc été tendu, avec un 0-0 au bout.

(Photo Daniel Mihailescu/AFP)

Mais les doutes que l’on pouvait avoir se sont confirmés contre les Pays-Bas avec une défaite 4 à 1 qui a dû faire mal ? 
Un match très difficile, oui, et dans lequel j’ai joué un rôle très important. Sans dire que toute la responsabilité de cette défaite m’incombe, à partir du moment où vous avez un défenseur central qui n’est pas à la hauteur, cela devient très compliqué. Les gens ne s’en rendent pas compte lorsque cela se passe bien. C’est un peu comme si votre gardien n’était pas à la hauteur, cela fragilise toute l’équipe. Chaque joueur a un rôle très important sur le terrain et chaque joueur peut affaiblir ou renforcer l’équipe. J’avais éprouvé une sensation de fatigue et de fragilité physique avant ce rendez-vous.

Cette rencontre marque votre 142e et dernière sélection avec les Bleus.
Oui, et c’est un regret. Mais on ne peut rien y faire, c’est comme ça. On voudrait tous avoir la chance de terminer son parcours en sélection sur un souvenir agréable ou un beau jubilé, comme pour certains. Pour moi, on va dire que la boucle était bouclée. Mon dernier match en Équipe de France a été celui où j’ai été le plus nul ! C’est assez logique ! (Rire). Après cette rencontre, je suis allé voir le coach pour lui dire que je n’aurai pas la capacité de disputer la suivante. Il faut savoir affronter la réalité des choses. Mais je ne savais pas encore que nous serions éliminés et que je venais de jouer mon dernier match en bleu.

Cet Euro 2008 annonçait ce qui allait se passer en 2010

 

L’Euro des Bleus s’est achevé au premier tour par un revers contre l’Italie (2-0), deux ans après une finale de Coupe du monde. Peut-on parler d’échec ?
C’est vrai que nous n’avons pas gagné de match dans cet Euro... Je le répète, l’équipe n’a pas été à la hauteur. Ce sont des choses qui arrivent. Les joueurs n’étaient plus les mêmes, Zidane n’était plus là, d’autres également, et les cadres qui étaient encore là avaient deux ans de plus. La Coupe du monde 2006 n’était pas la garantie de réaliser un bon Euro. Même après une finale, il faut savoir se remettre en question. On a peut-être oublié de le faire. Ce groupe manquait de maturité, et puis certaines choses se sont jouées à des détails, comme souvent. N’oublions pas la blessure de Patrick Vieira aussi, juste avant le tournoi.

On a beaucoup évoqué à l’époque un « choc » de générations entre les jeunes et les anciens. 
Les anciens n’étaient plus très nombreux. Comme je le disais, il y avait une certaine immaturité dans le groupe. Cela s’est mal fini. Et pour moi, cet Euro 2008 annonçait ce qui allait se passer en 2010.

Un Euro à oublier, donc ?
Non, au contraire. On ne peut pas se souvenir que des bonnes choses. Ҫa serait trop facile. Dans une carrière, il faut tout prendre. On apprend beaucoup des victoires mais on apprend aussi dans la défaite. J’ai toujours fait en sorte de donner mon maximum sur un terrain, d’être honnête vis-à-vis de mes coéquipiers et de moi-même. Souvent ce fut bien, parfois moins, mais je suis parti avec cette idée d’avoir sans cesse tout donner pour l’équipe nationale. »

(Photo Valéry HACHE/AFP)

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