LA SAGA DE LA COUPE DU MONDE

Yannick Stopyra : « Parti en éco, revenu en classe affaires »

samedi 1 octobre 2022 - 09:00 - Richard LOYANT
Yannick Stopyra Coupe du monde 1986

L’avant-centre, formé au FC Sochaux-Montbéliard et évoluant alors au Toulouse FC, a connu son apogée en bleu au Mondial 1986, dont des épisodes lui servent encore aujourd’hui.

6
Matches de Coupe du monde disputés en trente-trois sélections
481
Minutes de jeu au Mondial 1986 (cinq titularisations, une entrée)
2
Buts marqués contre la Hongrie (poule) et l’Italie (8e de finale)

« Quand avez-vous su que vous joueriez cette Coupe du monde 1986 ?
En 1982, je suis dans la pré-liste mais je ne fais finalement pas partie des vingt-deux, comme ensuite pour l’Euro 1984. Quand la liste a été donnée par Henri Michel, j’étais dans le bus du Téfécé pour aller jouer contre l’AS Nancy-Lorraine. Tout a commencé là, avec trois Toulousains possibles : Philippe Bergerôo a été pris, pas Jean-François Domergue et quand j’ai entendu mon nom en avant-dernier, j’ai eu une part de retenue par rapport à Jeff. Mais comme tout le monde dans le bus a crié… J’ai été appelé comme le 22e, malheureusement à cause de la blessure de José Touré. J’en étais conscient. Après, passer aussi longtemps avec de tels joueurs et avec une barre placée à un aussi haut niveau, c’est très positif. Il y avait une belle ambiance et l’équipe était tellement bien organisée : il y avait des boss, des sous-lieutenants, des soldats… Tout ce qu’il faut et chacun a joué son rôle. Finalement, je suis parti en éco et je suis revenu en classe affaires. 

Buteur en huitième de finale contre l’Italie, champion sortant, après avoir marqué en poule contre la Hongrie (photo Gerard BEDEAU / ONZE / ICON SPORT).

Sans être pourtant titulaire au premier match…
Avant le départ, un journaliste est venu me dire que Michel Platini préférait soi-disant jouer avec Jean-Pierre Papin. Que ce soit vrai ou faux, je lui ai répondu : "Que voulez-vous que je dise si « le Bon Dieu » pense cela ?" [Rires]. Mais je suis parti au Mexique avec un livre sur les pensées positives, qui m’a beaucoup aidé. J'entre contre le Canada et je fais marquer Jean-Pierre pour le seul but du match. Le coup d’après, Henri Michel me fait confiance et voilà. J’avais aussi dit au journaliste que j’étais tellement bien dans ma tête et physiquement que si j’avais la place, on ne me la prendrait plus. C’est ce qui s’est produit.

La fiche de Yannick Stopyra

Quel est votre meilleur souvenir de ce Mondial ?
Un souvenir de musique, de samba, de lumière, d’or et de vert dans les tribunes... Et sur le terrain, pas d’agressivité. Ce France-Brésil est un moment inoubliable, avec la qualification pour couronner le tout…

Un match ou vous êtes décisif sur le but de Michel Platini…
J’ai redit il n’y a pas longtemps à Michel que j’étais à l’origine de son but. Il m’a répondu, avec la répartie qu’on lui connait : "En fait, tu t’es sacrifié pour la France, pour ton pays." [Rires]. On ne calcule pas, cela va tellement vite... Je sais que je ne peux pas avoir la balle, le gardien sort et se couche… Je ne sais pas ce qui m’a pris, j’ai peut-être voulu l’intimider ou simplement lui dire : "Aujourd’hui, ce n’est pas toi, c’est moi qui vais gagner !" Tant mieux, le destin et Michel ont voulu le reste sur cette "passe décisive" qui n’est pas reconnue comme telle [rires].

Son tête-à-tête avec le gardien brésilien Carlos qui va déboucher sur l’égalisation de Michel Platini, à l'affût au second poteau (photo Michel BARRAULT / ICON SPORT).

Vous marquez aussi un tir au but, vous souvenez-vous de votre état d’esprit ?
Le souvenir d’avoir tiré ce penalty m’aide toujours beaucoup aujourd’hui. Quand j’ai des moments difficiles à affronter, je repense à cet instant-là, quand j’y suis allé. Henri Michel est venu me voir pour me dire : "Yannick, tu tires un penalty". Je lui ai répondu : "Ouh là ! Fais un tour avant". Il est revenu et j’ai dit : "Ok, mais je tire le premier". Je me connais, je suis assez émotif, le temps aurait pesé contre moi. Là, je n’ai pas eu le loisir de gamberger en regardant passer les autres. Ce n’est pas si facile, vous êtes pratiquement tout seul contre la Terre entière. Tout le monde vous regarde, il n’y a que vous pour réaliser ce geste. Je l’ai fait et je reste assez fier de ce moment.

La durée et l’intensité de ce quart ont-elles pesé en demi-finale contre la RFA ?
C’est vrai que l’on a laissé beaucoup de jus contre le Brésil mais d’autres éléments ont fait la différence. Quand j’ai démarré le football, on nous parlait du baron de Coubertin, que le principal était de participer... Mais quand vous disputez un Mondial, cette phrase qui est noble n’est pas jouable pour un sportif. On m’a aussi beaucoup parlé de fair-play dans ma formation… Les Italiens, les Anglais sont fair-play mais quand ils gagnent, pas quand ils perdent. Et puis, tout le monde a dit que France-Brésil était la finale avant la lettre : c’était peut-être la finale rêvée mais ce n’était qu’en quarts… Enfin, on s’est aussi dit avant la demie que l’Histoire ne pouvait pas se répéter après la désillusion de 1982. En fait, si… Au premier ballon que j’ai touché, dès le coup d’envoi, un Allemand est venu sur moi et m’a séché. C’était un petit message pour me dire : "Ce soir, tu ne vas pas rigoler." Le match nous a échappé. Autant on a dominé contre l’Italie et fait jeu égal avec le Brésil, autant je n'ai pas senti que l’on pouvait gagner contre l’Allemagne. » 

Lors de la demi-finale perdue (2-0) contre la RFA (photo Alain DE MARTIGNAC / ONZE / ICON SPORT).

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