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AS Fontonne Antibes, la passion adaptée

lundi 29 janvier 2024 - 12:52 - Richard LOYANT
Football adapté AS Fontonne Antibes

Le club de la Côte d’Azur a créé une section adaptée et ouvert de nouveaux créneaux pour permettre à des enfants autistes de 6 à 15 ans d’accéder à la pratique du football.

À sa création en 1958, l’AS Fontonne Antibes a pris pour devise « Vouloir, c’est pouvoir ». Le slogan « Ici, tout est différent » l’a complété depuis son entrée dans l’ère des réseaux sociaux mais les deux illustrent parfaitement l’opération Passion Foot qu’il a initiée en 2021. Séparé du bord de mer par une départementale et la voie ferrée menant à Nice, son stade du Docteur Joseph-Léger reçoit depuis deux fois par semaine la section lancée pour favoriser la pratique d’un football adapté à des enfants de 6 à 15 ans, porteurs de divers troubles psychologiques et d’autisme. Jean-Pierre Calatayud, au club depuis vingt-cinq ans, secrétaire général depuis 2019, raconte cette aventure couronnée par le Grand Prix « solidarité et inclusion » 2023 des Trophées Philippe-Séguin du Fondaction du Football.

 AUX ORIGINES 
« Tout est parti d’une discussion »

Un simple échange informel en marge des terrains a présidé à la création de Passion Foot, se souvient Jean-Pierre Calatayud. « Un parent du club était en contact avec la Fondation Lenval, qui gère un hôpital pour enfants et plusieurs établissements sociaux et médico-sociaux à Nice, notamment pour des enfants autistes et aux comportements neuro-atypiques. Il nous expliquait qu’il n’y avait pas de club qui acceptaient ces enfants-là, qu’il était difficile de trouver des structures où ces gamins pouvaient avoir accès au sport en général. Notre président s’y est intéressé au point de passer une convention avec cette fondation et cela s’est enchaîné simplement. Tout est parti de cette discussion, cela va faire maintenant trois saisons ».

Philippe Diallo, président de la FFF, Gilles Massa, co-président du club, Jean-Pierre Calatayud, Franck Simoes, l’autre co-président, à la remise du trophée (photo Bruno BADE/Fondaction du Football).

 LE COUP D’ENVOI 
« On a dû élargir nos créneaux »

« La fondation a d’abord choisi les enfants qui allaient venir sur un créneau spécialement ouvert le mercredi matin, développe le secrétaire général. Tous ne peuvent malheureusement pas participer car certains ont des handicaps très lourds. Ils sont venus avec deux ou trois éducateurs et on s’est lancé avec le formateur spécialisé que nous avons la chance d’avoir au club, Matthieu Chicault, diplômé Staps option activités physiques adaptées, aussi à l’origine de cette section ».

L’expérience a été si fructueuse que d’autres structures de la région n’ont pas tardé à s’y intéresser. « Plusieurs nous ont contactés pour voir si on pouvait également passer des conventions avec eux. On a signé avec les instituts médicoéducatifs (IME) Henri-Wallon de Villeneuve-Loubet, Pierre-Merli d’Antibes et Le Moulin, de Biot. En passant à quatre instituts, on a dû élargir à deux créneaux le mercredi car on ne pouvait pas accueillir trop d’enfants en même temps. Ils sont aujourd’hui entre douze et vingt âgés de 12 à 17 ans sur ces deux sessions, étonnamment que des garçons mais probablement aussi parce qu’il y a très peu de filles dans ces établissements ».

 SUR LE TERRAIN 
« Du ludique, pas de compétitif »

Mettre en place cette opération a été plutôt aisé côté club. « Il n’y a pas eu de choses particulières à installer, explique le dirigeant. On n’avait pas de séances d’entraînement le mercredi matin, cela n’a donc pas été un souci d’ouvrir ce créneau. On n’a pas eu besoin non plus d’aménagements spécifiques puisque l’on dispose du matériel nécessaire et du soutien de notre éducateur. Cela a été plus que bien accepté, des dirigeants se sont même investis pour aider Matthieu ».

Les premiers pas ont pourtant plus complexes qu’imaginé. « Lors de la première séance, on s’est dit que cela allait être très compliqué parce que l’on n’avait pas l’habitude de tels enfants. Ils ont des comportements que l’on ne connaissait pas trop et des réactions surprenantes pour qui n’a pas l’habitude de les côtoyer. Mais on s’est aperçu petit à petit qu’ils s’intégraient très bien au sportif et à ce nouvel environnement. Leurs éducateurs savent aussi comment les gérer et cela nous a permis de beaucoup apprendre. Cela s’est mis en place au fur et à mesure et cela se déroule aujourd’hui très bien, à partir du moment où l’on reste sur du ludique et pas du compétitif ».

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Matthieu Chicault, éducateur spécialisé de l’AS Fontonne, dirige une séance (photo AS Fontonne Antibes).

 LES RÉSULTATS 
« Des comportements apaisés »

L’étape suivante a consisté à ouvrir l’opération aux jeunes du club. « On a intégré nos U11 à une séance, une sorte de plateau où l’on a mélangé nos enfants avec ceux de ces instituts, raconte Jean-Pierre Calatayud. Nos joueurs, à 95 %, ne connaissaient pas ce type de handicap qu’ils ont découvert après avoir accepté de participer. Ils ont été très réceptifs et cela a permis de les sensibiliser à ces différences ». 

Sans réticences, ni arrière-pensées. « Ils les ont pris comme des enfants lambda, comme leurs copains, se réjouit le secrétaire général. Ils n’ont pas ce regard que peuvent avoir les adultes : ils ont bien compris qu’ils n’avaient pas le même niveau football qu’eux et que c’était normal, que ce n’était pas une compétition mais du plaisir avant tout. Cela s’est donc très bien passé ». 

Et avec des bénéfices réciproques. « Pour avoir discuté avec leurs éducateurs, cela apporte aussi énormément aux enfants des centres. La plupart disent que cela a apaisé leurs comportements. Quand ils viennent les mercredis matin, ils ressentent cela comme une récompense, cela leur fait énormément de bien au niveau thérapeutique en les sortant de la routine du centre. Ils progressent et c’est pour cela que l’on a maintenant encore des demandes d’autres instituts ».

Les U11 du club avec les jeunes des instituts en décembre 2022 (photo AS Fontonne Antibes).

 ALLER PLUS LOIN 
« Apporter expérience et soutien »

« Après avoir communiqué, plusieurs parents dont les enfants n’étaient pas en institut nous ont contactés pour nous demander s’ils pouvaient rejoindre l’opération, explique Jean-Pierre Calatayud. On n’a d’abord pas pu car on ne pouvait pas réglementairement les intégrer à ceux des instituts conventionnés. On a donc choisi la saison dernière d’ouvrir un nouveau créneau, le samedi matin. Ces enfants hors institut viennent avec leurs parents, Matthieu est là comme éducateur avec deux enfants du club pour l’aider et un dirigeant pour encadrer ». 

Avec, là encore, la satisfaction de retombées positives. « On a directement affaire aux parents et on voit leur joie. Ils nous disent que c’est la première fois qu’ils peuvent avoir accès au sport. C’est très important pour eux et pour leurs enfants qui, depuis qu’ils viennent, sont plus épanouis. Leurs comportements ont changé, tout est bénéfique ! ».

Au point d’atteindre le quasi maximum de ses capacités mais avec aussi l’ambition affichée d’étendre encore l’expérience. « Il faudrait multiplier les créneaux pour accueillir davantage de ces enfants mais ce n’est pas simple avec notre nombre de licenciés (851, dont 83 féminines). Certains viennent aussi d’un peu loin et cela pourrait être une bonne option de développer vers d’autres clubs et IME, afin de faciliter leurs déplacements. Un institut au-dessus de Nice, par exemple, ne peut pas venir sur nos terrains pour une séance d’une heure avec pratiquement une heure de trajet aller et autant retour. Le bon compromis serait de nous déplacer sur d’autres clubs en leur apportant notre expérience et notre soutien ». 

 ÉCUEILS ET CONSEILS 
« Une bonne leçon de vie »

Avec le recul, Jean-Pierre Calatayud ne voit « pas de contrainte, hormis celle de bien préparer les licenciés et les enfants de cette section pour que tout se passe bien. On n’a pas fait de réunion spéciale, on a simplement communiqué au sein du comité directeur et sur nos réseaux sociaux, tout naturellement. Il faut aussi un éducateur spécialisé et admettre, je le répète, que ce n’est pas de la compétition mais uniquement du ludique. Il n’y a pas d’a priori dans le club, de regard malveillant ou de peur de la différence. Franchement, on prend cela comme apporter du plaisir et on voit tout de suite celui des enfants. Il n’y a que des sourires et de la joie, c’est une bonne leçon de vie ».

En parfaite synergie avec la philosophie de ce club de quartier, « très associatif et éducatif, partie prenante de sa vie quotidienne. Des parents nous ont dit que l’on était les seuls à faire cela, qu’ils avaient essayé ailleurs mais qu’il leur a été répondu que ce n’était pas le rôle d’un club. Nous, on pense le contraire. Un club de foot n’est pas que de la compétition. Pourquoi ces enfants n’auraient-ils pas le droit de jouer au foot dans un club ? Du moment que l’encadrement est adéquat et que tout se passe bien, je ne vois pas pourquoi. On doit avoir ce rôle éducatif, de solidarité et d’ouverture. Cela apporte à tout le monde, à ces enfants comme au club ».



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Avec cette série des « Belles réussites du football amateur », la FFF met à l’honneur les initiatives et actions engagées par ses clubs partout en France. De quartier ou ruraux, avec plus ou moins de licenciés et licenciées mais toujours la même passion des pratiquants et pratiquantes, éducateurs et éducatrices, dirigeants et dirigeantes, de tous âges et toutes générations.

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